Sous le cri « Nos enfants où sont-ils ? » la 3 ème édition du Forum migrants Maghreb-Machrek a été inaugurée les 18, 19 et 20 avril 2014 à Monastir.
Ce cri résume à lui seul la détresse des familles face à l’un des grands drames des temps modernes, celui de la disparition de milliers de jeunes dans la méditerranée et dans le désert. La méditerranée l’un des berceaux de la civilisation mondiale s’est transformée en plein 21 ème siècle et sous nos yeux en un gigantesque cimetière marin. Cette hémorragie humaine n’est pas le fait du hasard. Elle est la résultante des politiques migratoires menées par l’Europe avec la complicité des Etats et des gouvernements du sud de la méditerranée. Une politique sécuritaire inhumaine qui a érigé des murs visibles et invisibles au lieu de construire des ponts entre les peuples des deux rives de la méditerranée.
Cette politique migratoire ségrégationniste menée par les pays du Nord prend une dimension encore plus grave dans la mesure où les gouvernements du sud s’illustrent par leur incapacité d’avoir une politique migratoire indépendante et capable de faire front aux intérêts du libéralisme sauvage.
Les participants à cette 3ème édition du Forum des migrants ont par ailleurs exprimé leur inquiétude face à la situation des migrations au Moyen-Orient qui se réfugient en direction de l’Europe, et dont sont victimes des jeunes, des femmes et des enfants naufragés dans la méditerranée, ainsi que la situation des migrants dans la région du golfe.
L’une des données fondamentales des évolutions du phénomène migratoire est que les pays du Maghreb sont dorénavent des pays non seulement d’émigration mais aussi d’immigration. Ils accueillent des migrants subsahariens et d’autres zones du monde, et ce depuis des décennies sans qu’ils ne puissent bénéficier du moindre droit, dans une situation de précarité et de violation des droits humains les plus élémentaires. Ces hommes et ces femmes sont appelés à vivre et travailler dans les sociétés maghrébines. Ce brassage des populations est une chance pour le Maghreb. Or, les politiques actuelles vont à l’encontre du sens de l’Histoire à travers les discriminations et le racisme dit « ordinaire » mais surtout le racisme des institutions dont souffre essentiellement les subsahariens dans tous les aspects de leur condition de vie (Séjour, habitat, travail, éducation, santé…).
Il est plus que jamais urgent d’avoir une vision à long terme des questions migratoires, capable de favoriser l’épanouissement des énergies pour un développement solidaire et pour la démocratie et la justice sociale. La liberté de circulation et d’installation dans l’espace maghrébin est une condition nécessaire pour l’épanouissement des énergies de la jeunesse maghrébine, des migrants vivant sur le sol maghrébin et de l’ensemble de la population. Le coût du non-Maghreb représente un véritable frein pour le développement de l’ensemble de cette région, alors qu’elle possède des richesses humaines et naturelles considérables.
Face à cette situation, les participants (es) à la 3 ème édition du Forum des migrants affirment leur attachement à :
– Un espace maghrébin ouvert sur le Machrek et l’Afrique subsaharienne, démocratique et solidaire, respectueux des droits humains et permettant une coexistence harmonieuse riche de ses différentes composantes arabes, amazighs et africaines.
– La libre circulation et d’installation de tous les citoyens et résidents au Maghreb.
– L’abrogation des accords de partenariat pour la mobilité signés entre l’UE et le Maroc d’une part, et l’UE et la Tunisie d’autre part.
– La fin des exactions et des atteintes graves aux droits des migrants, notamment celles des femmes migrantes victimes de violences multiples.
Par ailleurs, les participants (es) appellent l’ensemble de la société civile mondiale à faire pression sur les gouvernements du Nord comme du Sud pour l’obtention de la vérité sur le sort des disparus en Méditerranée et dans le désert, ainsi que celui des réfugiés de la région Maghreb – Machrek.
Les participants (es) appellent à lutter pour mettre un frein au développement du racisme ordinaire et dans les institutions qui commence à gangréner nos sociétés à travers la mise en œuvre de lois contre le racisme et les discriminations.
Pour contribuer à la mise en œuvre de ces orientations, les participants à la 3 ème édition du Forum des migrants ont décidé la création d’un observatoire des migrants et des réfugiés, outil d’alerte contre toutes les violations des droits des migrants, et de plaidoyer auprès des gouvernants pour une nouvelle politique migratoire humaine, solidaire et ouverte sur le monde.
Monastir le 20 avril 2014