L’ALECA agriculture : Asymétrie et conséquences

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    Mohamed Bouhdida : L’ALECA agriculture : Asymétrie et conséquences

    L’agriculture tunisienne occupe une place de choix dans la vie socio-économique nationale et ce en égard à sa participation importante dans le PIB (8 à 10 % contre 1,6 % pour l’UE ), dans l’emploi (15 à 16% ), dans l’équilibre de la balance commerciale ( 10 à 13% ) et dans la croissance économique du pays ( 4,8% moyenne 2011-2015 ).

         Cependant, cette position privilégiée du secteur agricole dans l’économie nationale cache une réalité difficile et délicate à plusieurs niveaux dont :

          * un environnement bio-climatique précaire dominé par l’aridité (plus des 2/3 du pays sont situés dans des zones arides) ce qui limite naturellement le potentiel productif des terres et des cultures.

          * des ressources en sol et en eau limitées (5 millions d’hectares de terres labourables dont 450,000 Ha en irrigué seulement 8% ).

          * des structures agraires dominées par la petite exploitation peu intensificatrice et très peu organisée.

          * une dépendance de plus en plus grande vis à vis de l’extérieur en céréales, huile de graine, aliments de bétail, semences maraîchères.

          L’ALECA agriculture proposé par l’UE à la Tunisie vise une libéralisation totale des échanges entre les deux parties moyennant un appui technique et financier au développement de l’agriculture tunisienne (programme des filières prioritaires demandé).

          Or le problème n’est pas uniquement un problème de développement et ou d’appui financier et technique ou de mise à niveau mais il réside surtout au niveau de l’asymétrie presque totale entre l’état des deux agricultures à mettre en concurrence, notamment au niveau :

          1) des conditions bio-climatiques largement en faveur de l’UE. En effet seulement 3% des terres tunisiennes se trouvent dans des zones a climat comparable à celui du sud de l’Italie, de la France ou de l’Espagne.

          2) de la grande différence ou disparité dans la productivité en agriculture dont le rapport est de 1 à 7 au profit de l’UE.

          3) de la différence flagrante de la moyenne des subventions à l’hectare qui sont de 700 Euros / Ha / an pour l’UE alors qu’elles ne sont que de 40 Euros / Ha / an en Tunisie.

           A la lumière de cette asymétrie bio-climatique, de productivité et de soutien interne, l’ALECA agriculture :

    * ne peut profiter qu’aux productions destinées à l’exportation notamment l’huile d’olive, les dattes et les produits de pêche.

    *mettrait en difficulté voire au chômage technique une grande partie des petits et moyens producteurs de céréales, de lait, de viande rouge et notamment les pommes et affecterait sérieusement la souveraineté alimentaire du pays.

          Enfin, la crise alimentaire de 2007 – 2008 et 2011 a montré l’insuffisance de la théorie de l” avantage comparatif ” cheval de bataille de l’OMC et la Banque Mondiale et a élevé la notion de sécurité alimentaire au rang de souveraineté alimentaire.