Déclaration de la session préparatoire du congrès sur les droits et libertés et pour une république démocratique et juste

Déclaration de la session préparatoire du congrès sur les droits et les libertés et pour une République démocratique et juste

Aujourd’hui, samedi 31 mai 2025, nous concluons la session préparatoire de la Conférence nationale sur les droits et les libertés et pour une République démocratique et juste, avec la participation de représentants de nombreuses associations, de partis, de jeunes militants et d’activistes indépendants.

L’initiative a eu une résonance positive, car elle a remué des eaux stagnantes et fourni à de nombreux acteurs un horizon possible pour une action civile et politique plus efficace qui rompe avec l’état de désorientation et de fragmentation et entreprend la tâche de défendre les droits, les libertés et la démocratie avec la clarté, la radicalité et l’agrégation qu’elle exige.

Cette initiative s’inscrit dans un contexte d’escalade totalitaire et répressive de la part des autorités, comme en témoignent les verdicts injustes dans l’affaire du « complot », suivis de l’arrestation et de l’emprisonnement de l’avocat et ancien juge Ahmed Souab, qui vient s’ajouter à la liste interminable des victimes de la criminalisation des activités politiques, civiles, journalistiques et syndicales. En s’appuyant sur des pratiques policières répressives et en utilisant son contrôle sur les tribunaux, soumis à l’arbitraire des dérogations et des mandats de travail, le monopole du pouvoir et le changement de pouvoir ont ouvert la voie à la criminalisation du travail politique, civil, journalistique et syndical. La monopolisation du pouvoir et le changement unilatéral du système de gouvernement ont progressivement éradiqué les acquis de liberté que le peuple a obtenus par sa révolution et le sang de ses martyrs, pour revenir à un climat de silence, de peur et d’intimidation, tant au sein des institutions de l’Etat qu’à l’encontre des corps intermédiaires, des médias, des acteurs de la vie publique et de l’ensemble des citoyens, transformant la Tunisie en une grande prison.

L’expérience a prouvé le mensonge selon lequel la monopolisation du pouvoir est efficace pour obtenir des résultats économiques et sociaux. Le régime fait face à la profonde crise économique et sociale que vivent les Tunisiens en vendant des illusions et de la propagande, et en adoptant la théorie du complot comme seul moyen d’expliquer toutes les crises. En se cachant derrière un récit conspirationniste et en inventant des « ennemis intérieurs » pour justifier l’irresponsabilité absolue du détenteur du pouvoir absolu, le régime ignore les facteurs structurels des crises de la pénurie d’eau, de la hausse des prix et de la détérioration des services publics en raison des politiques d’austérité. Il s’est également caché derrière un récit raciste haineux pour dissimuler son rôle de gardien des frontières européennes en échange de la reconnaissance politique du régime et de sommes d’argent dérisoires, laissant des milliers de migrants tunisiens en Europe et subsahariens en Tunisie et leurs sympathisants payer le prix de la soumission de l’État aux politiques du gouvernement néo-fasciste en Italie.

Le retour des protestations sociales, qu’elles soient le fait de secteurs, d’organisations ou d’individus, est une indication claire de la fausseté de la propagande et des slogans du régime, et de la colère sociale croissante. Comme d’habitude, les autorités répondent aux protestations par la répression et la punition, comme à Mazouna et Zarzis ou contre les jeunes qui manifestaient pour le droit à un environnement sain à Gabès, et elles utilisent leurs armes pour pirater et faire avorter tout mouvement social, comme dans le cas des femmes travaillant dans le secteur agricole. Les mouvements sociaux ont mis en évidence l’incapacité de l’autorité à trouver des solutions réalistes et ont révélé que son investissement dans la haine et les griefs et le marketing de mesures superficielles n’éteindront pas les revendications populaires pour une vie digne.

L’escalade et l’expansion de la répression sont un signe de faiblesse et de terreur dans les rangs du régime. Sa capacité à détruire systématiquement les acquis de la révolution ne peut couvrir son manque de durabilité, sa dépendance totale à l’égard de la personne du président et son incapacité à construire une structure cohérente et même à appliquer les dispositions de sa propre constitution unilatérale.  Tout en réaffirmant que le système autocratique est irréparable, son isolement et son refus de dialoguer et de reconnaître la crise ne font qu’accroître son danger et sa fragilité. D’autre part, de larges secteurs de la société sont de plus en plus convaincus que l’effondrement doit cesser, que le peuple doit retrouver son pouvoir de décision démocratique et que les acquis de sa révolution doivent être rétablis.

Les points communs que nous partageons dans la défense des droits de l’homme dans leur universalité et leur globalité, la justice sociale et l’adhésion à la révolution de la liberté et de la dignité et à ses acquis nous obligent à adopter une position de principe et décisive qui condamne les poursuites politiques, le processus de liquidation des opposants politiques et les mesures arbitraires telles que la restriction des activités des partis et des associations, la fermeture des sièges et l’empêchement des réunions. Une position qui ne fait pas de différence entre les victimes de la tyrannie et qui ne confond pas la responsabilité politique avec la responsabilité pénale. Une position qui reconnaît le droit de tous à l’action politique et civile et qui croit en une démocratie fondée sur la rivalité politique entre des sens différents et non sur l’antagonisme et l’annulation. Si nous croyons à la nécessité de tirer toutes les leçons de l’échec de l’expérience démocratique à tenir ses promesses, cela ne justifie en aucun cas l’acceptation d’un régime autoritaire ou le report de l’exigence de construction d’une république démocratique. Il est impossible de dissocier les luttes quotidiennes pour les droits de l’homme et les luttes sociales de la demande de reprise du processus démocratique, de renversement de la règle de l’individu et de construction d’un État de droit et de vérité. Exiger des libertés tout en acceptant un système politique fondé sur le règne de l’individu n’a pas de sens politique. La tâche politique et des droits de l’homme aujourd’hui est de penser à une feuille de route pour le retour à une république démocratique qui pose courageusement la question de la légitimité constitutionnelle et du système politique, et qui traduise une position de principe sur la nature du système autoritaire existant et l’impossibilité de le réformer

L’expérience de l’activisme post-25 juillet 2021 a montré le besoin urgent de méthodes de lutte qui unissent les rangs et sortent de l’impasse actuelle, sur la base d’un contenu et d’alternatives clairs. Cela nécessite la mise en place de mécanismes de travail démocratiques basés sur la discussion et le débat, le dépassement de l’isolationnisme et l’ouverture aux différentes énergies militantes au sein de la société. C’est pourquoi, à l’issue de cette session, nous déclarons le début d’une nouvelle phase d’activisme, à travers une dynamique de réflexion et de mobilisation collective capable d’affronter la tyrannie, de construire des ponts avec les affluents de la résistance sociale et de changer le rapport de force en faveur de la volonté de changement démocratique. Notre seule voie est une lutte pacifique et civile, sans séparation entre les droits de l’homme et les revendications sociales et le changement politique pour un système démocratique qui garantisse la dignité humaine et exprime le pluralisme au sein de la société.

Des balles racistes et haineuses mettent fin à la vie d’un Tunisien en France

رصاص العنصرية والكراهية ينهي حياة مهاجر تونسي في فرنسا تعرّض مهاجر تونسي مقيم بفرنسا لجريمة عنصرية شنيعة يوم السبت 31 ماي عبر اطلاق الرصاص. قبل شهر شهدت فرنسا أيضا جريمة عنصرية في مسجد. تكشف هذه الجرائم عن أرضية خصبة من النقاش العام في فرنسا واوروبا والتي يتم فيها استعمال عبارات عنصرية ضد المهاجرين والمسلمين يغذيها اليمين المتطرف بشعاراته ومقارباته التي تلقى رواجا في فرنسا وخارجها وسط تواطئ رسمي وتهاون في التصدي لهذه الخطابات. يعرب المنتدى التونسي للحقوق الاقتصادية والاجتماعية عن سخطه تجاه الجريمة البشعة التي استهدفت مواطنًا تونسيًا في فرنسا في عملٍ عنصري كريه. نُعلن تضامننا الكامل مع عائلة الضحية، ونطالب السلطات التونسية العمل على تحمل مسؤولياتها  باتخاذ كافة الإجراءات الديبلوماسية لضمان تقديم الجاني إلى العدالة وحماية حقوق وكرامة المهاجرين التونسيين في كل مكان. إن هذا الفعل الإجرامي يعكس الوجه القبيح للعنف العنصري الذي لا يزال يهدد المهاجرين التونسيين في فرنسا وأوروبا عموما ويسعى لتقسيم المجتمعات على أسس عرقية ودينية ويصوّر المهاجرين كخطر يهدد المجتمعات المحلية. إن هذه الجريمة البشعة هي تذكير متحدد بأننا جميعًا مسؤولون عن بناء مجتمعات أكثر إنصافًا وعدالة، وأن الوقوف ضد العنصرية هو واجبنا جميعا. المنتدى التونسي للحقوق الاقتصادية والاجتماعية الرئيس عبدالرحمان الهذيليرصاص العنصرية والكراهية ينهي حياة مهاجر تونسي في فرنسا تعرّض مهاجر تونسي مقيم بفرنسا لجريمة عنصرية شنيعة يوم السبت 31 ماي عبر اطلاق الرصاص. قبل شهر شهدت فرنسا أيضا جريمة عنصرية في مسجد. تكشف هذه الجرائم عن أرضية خصبة من النقاش العام في فرنسا واوروبا والتي يتم فيها استعمال عبارات عنصرية ضد المهاجرين والمسلمين يغذيها اليمين المتطرف بشعاراته ومقارباته التي تلقى رواجا في فرنسا وخارجها وسط تواطئ رسمي وتهاون في التصدي لهذه الخطابات. يعرب المنتدى التونسي للحقوق الاقتصادية والاجتماعية عن سخطه تجاه الجريمة البشعة التي استهدفت مواطنًا تونسيًا في فرنسا في عملٍ عنصري كريه. نُعلن تضامننا الكامل مع عائلة الضحية، ونطالب السلطات التونسية العمل على تحمل مسؤولياتها  باتخاذ كافة الإجراءات الديبلوماسية لضمان تقديم الجاني إلى العدالة وحماية حقوق وكرامة المهاجرين التونسيين في كل مكان. إن هذا الفعل الإجرامي يعكس الوجه القبيح للعنف العنصري الذي لا يزال يهدد المهاجرين التونسيين في فرنسا وأوروبا عموما ويسعى لتقسيم المجتمعات على أسس عرقية ودينية ويصوّر المهاجرين كخطر يهدد المجتمعات المحلية. إن هذه الجريمة البشعة هي تذكير متحدد بأننا جميعًا مسؤولون عن بناء مجتمعات أكثر إنصافًا وعدالة، وأن الوقوف ضد العنصرية هو واجبنا جميعا. المنتدى التونسي للحقوق الاقتصادية والاجتماعية الرئيس عبدالرحمان الهذيلي

Rafles, expulsions, discours de haine : la dérive anti-migrant·e·s en Algérie

0

Rafles, expulsions, discours de haine : la dérive anti-migrant·e·s en Algérie

Communiqué interassociatif

Depuis plusieurs années, une montée alarmante des discours de haine et de stigmatisation visant les migrant·e·s subsaharien·ne·s est observée dans l’espace public algérien. Ces discours xénophobes, souvent relayés par certains médias ou amplifiés sur les réseaux sociaux, légitiment les abus et alimentent un climat de rejet généralisé. Les organisations signataires, dont Migreurop, condamnent fermement ces discours et appellent les autorités algériennes à cesser les expulsions collectives arbitraires et la criminalisation de la société civile solidaire. Depuis les tensions diplomatiques entre l’Algérie et le Mali, amorcées en 2022 autour du rôle d’Alger dans la médiation de l’accord de paix malien, et intensifiées en 2024–2025 par une série d’accusations croisées d’ingérence, de soutien à des groupes armés et de rupture de coopération sécuritaire, les migrant·e·s originaires d’Afrique subsaharienne sont devenu·e·s les cibles d’un déchaînement de discours racistes et de stigmatisation. Cette vague haineuse est alimentée de manière systématique par certains médias audiovisuels, des pages Facebook, des comptes influents sur les réseaux sociaux, qui diffusent sans retenue des propos discriminatoires, parfois ouvertement haineux, appelant à la méfiance, au rejet, voire à l’expulsion. Cette campagne violente et déshumanisante s’abat actuellement sur les personnes migrantes, sans aucune réaction sérieuse de la part des autorités. Loin d’être marginale, cette escalade a façonné un climat de peur, d’insécurité et d’humiliation pour des personnes déjà en situation de grande vulnérabilité. Plus préoccupant encore : l’attitude de l’État algérien, qui n’a pris aucune position officielle, n’a tenu aucun discours apaisant, et n’a mis en place aucune mesure réelle de protection. Pire, les autorités ont répondu positivement à cette campagne en menant des arrestations massives, des rafles dans les quartiers, et des expulsions collectives vers le Niger dans des conditions inhumaines, en violation flagrante du droit international. L’Algérie s’est pourtant dotée en 2020 de la loi n° 20-05 relative à la prévention et la lutte contre la discrimination et le discours de haine, censée marquer un engagement contre toute forme de racisme. Or, cette loi n’a jamais été appliquée pour réprimer les discours racistes ou xénophobes visant les personnes migrantes. À l’inverse, des cas documentés montrent qu’elle a été utilisée de manière sélective à l’encontre de militant·e·s des droits humains, notamment pour réprimer l’expression politique ou la dénonciation de discriminations. Dans ce climat de stigmatisation et d’hostilité, l’État algérien a mis en œuvre une politique répressive et systématique d’expulsions. Depuis l’accord bilatéral de réadmission signé en 2014 avec le Niger, ces pratiques se sont intensifiées. En 2024, plus de 31 000 personnes ont été expulsées vers le Niger selon plusieurs organisations humanitaires( selon Alarme Phone Sahara) — un chiffre record, illustrant une logique de purge migratoire, sans garanties procédurales. Plus récemment, entre le 1er et le 21 avril 2025, l’Algérie a expulsé plus de 4 900 personnes vers le Niger. Parmi elles, 2 753 Nigérien·ne·s ont été renvoyé·e·s par des convois officiels, dont 308 mineur·e·s et 196 femmes. En parallèle, 2 222 autres personnes, de diverses nationalités africaines, ont été expulsées par des convois non officiels, abandonné·e·s au lieu-dit «  Point Zéro  » et forcé·e·s à marcher près de 15 km dans le désert jusqu’à Assamaka, souvent sans eau ni nourriture, dans des conditions inhumaines.( selon Alarme Phone Sahara) Ces actes révèlent non pas une simple inaction, mais une participation active et systématique des autorités algériennes à cette vague raciste, à travers une politique répressive menée depuis 2014, bien avant les événements récents. Face à cette situation alarmante, nous :
  • Condamnons fermement : les discours de haine ; les expulsions collectives sans garanties légales ; les violences et détentions arbitraires ; la criminalisation des militant·e·s solidaires.
  • Rappelons les engagements internationaux de l’Algérie, notamment : la Convention de Genève (1951), la Convention internationale sur les travailleurs migrants (2005), la Convention (n° 97) de l’OIT sur les travailleurs migrants (ratifiée en 1962), et la Convention de Kampala.
  • Exhortons les autorités à mettre fin immédiatement aux expulsions arbitraires, à garantir l’accès à un recours effectif, et à adopter une législation nationale protectrice, en concertation avec la société civile indépendante.
  • Appelons les institutions régionales et internationales suivantes à enquêter sur la situation, établir les responsabilités et formuler des recommandations claires : la CADHP, le HCDH, la Commission d’experts de l’OIT, et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des migrant·e·s.
  • Appelons à l’application réelle de la loi 20-05, non pas contre les militant·e·s et les opposant·e·s, mais contre les véritables instigateurs de discours de haine.
Nous réaffirmons notre détermination à défendre la dignité, les droits et la sécurité des migrant·e·s subsaharien·ne·s en Algérie. Face à la répression, à la discrimination et à l’injustice, nous restons mobilisé·e·s et uni·e·s, pour exiger un changement immédiat et durable des politiques migratoires en Algérie.

Les organisations signataires

  • Adala For All
  • Alliance Transméditerranéenne des Femmes Algériennes ATFA
  • CNCD-11.11.11
  • EuroMed Droits
  • Riposte International
  • Confédération syndicale des Forces Productives – COSYFOP
  • MENA Rights Group
  • La Fondation Pour La Promotion des Droits
  • Centre Justitia Pour la Protection Légale des Droits Humains en Algérie.
  • Cairo Institute For Human Rights Studies – CIHRS
  • Committee for Justice (CFJ)
  • Statewatch
  • Forum Tunisien pour les Droits Économiques et Sociaux
  • L’Organisation Marocaine des Droits Humains- OMDH
  • Shoaa For Human Rights
  • Liberté Algérie
  • Collectif Des Familles de Disparus Algérie – CFDA
  • Fédération Internationale pour les Droits Humains FIDH
  • LDH (Ligue des droits de l’Homme)
  • Comité de Sauvegarde de la Ligue Algérienne Des Droits de l’Homme CS-LADDH
  • Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD)
  • Migreurop
  • Alternative Espaces Citoyens (AEC)

Rapport numérique de l’Observatoire Social Tunisien – Premier trimestre 2025

0

Observatoire social tunisien   Rapport janvier – mars 2025    Montée du mouvement de protestation Suicides par protestation et violence dans un contexte d’impunité persistante    Au début de l’année 2025, le mouvement de protestation a repris son activité et ses revendications, terminant le premier trimestre de l’année avec 1 132 actions de protestation. Les premiers mois de l’année ont repris leur élan et le rythme des manifestations a doublé de 238 % par rapport à la même période de l’année précédente. En 2024, seules 475 actions ont été enregistrées au cours des trois premiers mois de l’année, ce qui en fait l’année la plus faible en termes de mouvements depuis 2011.  Les revendications liées à la régularisation du statut professionnel des anciens dossiers sociaux non résolus, tels que les ouvriers des chantiers, les enseignants et les professeurs suppléants, le droit d’employer des chômeurs diplômés, l’amélioration des conditions de travail et le paiement des prestations, ont été les principaux axes du mouvement au cours des premiers mois de l’année. Ces questions ont été au centre des préoccupations du mouvement au cours des premiers mois de l’année et ont représenté un pourcentage de 53%.    Contrairement à la coutume, le discours officiel de la Présidence de la République, qui a appelé plus d’une fois à mettre fin aux contrats précaires, à résoudre les situations professionnelles en suspens et à réaliser la justice sociale souhaitée, a servi de catalyseur au lancement d’une vague de mouvements et de sit-in au début de l’année, dont les chiffres ont bondi et se sont multipliés plus d’une fois, et dont le rythme n’aurait pas été ralenti ou freiné sans l’arrivée du Ramadan au cours du mois de mars.   Le mois de mars a connu le nombre d’actions le plus bas depuis le début de l’année, avec 217 actions, comparé à février, qui a enregistré 432 actions, et à janvier, au cours duquel 483 actions de protestation ont été observées.  Au premier trimestre 2025, les acteurs sociaux adoptent de moins en moins l’espace numérique comme cadre de revendication au profit de l’espace public, notamment les lieux de travail, les routes, les lieux publics, les places, les institutions judiciaires et les prisons.  L’Observatoire social tunisien continue de suivre l’évolution de l’insatisfaction des Tunisiens, due à la hausse des prix, à la baisse du niveau de vie et à la difficulté de répondre aux besoins de la vie. En plus de protester contre l’insuffisance de l’infrastructure, la détérioration des services administratifs publics, la faiblesse de la flotte de transport, l’interruption continue de l’eau potable et la fluctuation de l’approvisionnement, qui est devenue un dilemme permanent et quotidien pour la population dans les villes et les zones rurales dans tous les gouvernorats de la République sans exception.  Les trois premiers mois de l’année ont été marqués par un autre déclin dans le domaine de la liberté d’expression et de la presse, les menaces et les violations se sont multipliées, et le niveau de harcèlement des journalistes et des utilisateurs des réseaux de médias sociaux a augmenté. L’organisation de la première session du procès des accusés dans l’affaire dite du complot, le 4 mars 2025, a été marquée par un retour féroce des campagnes de diffamation et du cyberharcèlement qui ont visé toutes les voix défendant le droit des accusés à un procès présentiel, et non à distance, dans lequel tous les fondements d’un procès équitable sont respectés.  L’équipe de travail suit l’attachement de la partie officielle à la rhétorique de la trahison et de la division et l’adoption d’un récit binaire entre les patriotes, les non-patriotes , les conspirateurs contre la sécurité et la stabilité de l’Etat. Simultanément, la situation des migrants subsahariens s’aggrave dans un contexte de violence et de discrimination croissantes à leur égard et d’incertitude quant à leur sort après qu’ils se sont retrouvés piégés dans des champs d’oliviers dans les délégations d’El Amra et de Jebeniana dans le gouvernorat de Sfax… incapables de partir ou de réaliser le rêve d’atteindre la rive nord de la Méditerranée.  Parallèlement, nous constatons la poursuite des mouvements de soutien à la résistance palestinienne tout au long des premiers mois de l’année, dénonçant la persistance du génocide perpétré par l’entité sioniste contre le peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie, en multipliant les actions de soutien de la part des Tunisiens et des Tunisiennes, et en prenant à chaque fois des formes culturelles et économiques plus diverses et plus riches (boycotts).  Les employés, les ouvriers et les chômeurs arrivent en tête des acteurs qui ont organisé des actions au cours du premier trimestre de l’année, où ils représentent l’acteur principal dans environ la moitié des actions enregistrées, suivis par les activistes, les défenseurs des droits et les syndicalistes, les étudiants, les prisonniers et les journalistes. Viennent ensuite les activistes, les défenseurs des droits, les syndicalistes, les étudiants, les prisonniers et les journalistes, qui représentent un quart des mouvements qui ont eu lieu sur les places et les boulevards depuis le début de l’année. La même période a également été marquée par des mouvements de résidents, d’agriculteurs, de commerçants, de chauffeurs de bus individuels et publics, d’étudiants, de parents, de travailleurs de la santé, de personnel médical, d’équipes et de joueurs de sport.  La capitale tunisienne, qui témoigne de la centralisation de la prise de décision, continue d’occuper la première place au premier trimestre de l’année, avec 293 mouvements sociaux. Viennent ensuite Tataouine avec 75 actions, Gafsa avec 74 actions, Kairouan avec 61 actions, Jendouba avec 54 actions, Nabeul avec 53 actions, Medenine avec 51 actions, Tozeur et Sidi Bouzid avec 50 actions, Kasserine avec 48 actions, Bizerte avec 40 actions, Sousse et Manouba avec 36 actions… La zone de protestation s’est étendue à tous les gouvernorats de la République sans exception, Zaghouan enregistrant le nombre le plus bas avec 12 actions au cours des trois premiers mois de l’année.  Plus de 88 % des actions observées se sont déroulées sur le terrain, au cours desquelles ont été principalement adoptés des veilles, des sit-in, des grèves du travail, des interruptions d’activité, des grèves de la faim, des blocages de routes, le port du badge rouge, des journées de colère et des fermetures de lieux de travail. Le reste a pris une forme numérique, sous la forme d’appels, de pétitions et de déclarations de condamnation à travers les médias et les sites de réseaux sociaux. Les mouvements enregistrés au cours des trois premiers mois de l’année n’ont fait l’objet d’aucune répartition entre les sexes, puisque 984 d’entre eux ont été organisés collectivement, tandis que les hommes formaient 107 mouvements et les femmes 41 mouvements.   Dans plus de 80 % des actions, les acteurs sociaux ont ciblé les autorités officielles, y compris la présidence de la République, la présidence du gouvernement, les autorités régionales, les ministères, les municipalités et les gouverneurs, tandis que les autres ont principalement visé les autorités judiciaires et l’employeur.  Sur la base de l’échantillon étudié, au cours des trois premiers mois de l’année, 33 cas et tentatives de suicide ont été suivis, dont une grande partie sous forme de protestations théâtrales dans l’espace public ou devant les sièges des services de sécurité ou à l’intérieur d’espaces judiciaires ou d’institutions éducatives. Ils ont choisi de communiquer leur détresse et l’ampleur du désespoir qu’ils ressentent, ce qui les a amenés à refuser de continuer et à mettre fin à leur vie par la pendaison, le feu, la consommation de substances toxiques ou de médicaments.   Les suicides suivis par l’équipe de l’Observatoire social tunisien comprennent 14 suicides de jeunes, 10 cas d’enfants, 8 cas d’adultes et un cas de personne âgée. Les hommes représentent 25 des suicides, tandis que les femmes représentent 8 cas.  Le premier trimestre de l’année a également été caractérisé par une violence généralisée dans un contexte général d’impunité dans les cas de féminicide, de propagation de la cyberviolence, de discours discriminatoires, de racisme et de diffamation… et une minimisation correspondante des effets de cette violence par les organismes officiels, les médias et les citoyens.   Les trois premiers mois de l’année ont enregistré une baisse du volume de la violence interpersonnelle, tandis que l’espace public a occupé le premier rang des lieux et des cadres dans lesquels la violence est exercée. Il s’agit de la rue, des établissements d’enseignement tels que les écoles et les instituts, des espaces administratifs et sanitaires, et des institutions de production économique.  La violence évolue progressivement vers des formes sexospécifiques, avec une proportion croissante d’agresseurs masculins représentant 84 % des cas enregistrés, tandis que le nombre de victimes de la violence est étroitement réparti entre les hommes, qui constituent 47 % des victimes, et les femmes, qui en représentent 40 %. Les agressions et les intimidations sont les principales cibles des cas de violence enregistrés, suivies par les vols et les agressions sexuelles.  Quant aux types de violence enregistrés au cours du premier trimestre de l’année, ils ont principalement pris la forme de délits criminels, les meurtres ou les menaces de mort représentant le plus grand nombre d’incidents observés, suivis par les vols et les cambriolages. D’autres actes de violence, tels que l’agression d’employés, l’enlèvement, le viol, la violence à l’égard des enfants et des femmes, la violence conjugale, le harcèlement sexuel, les menaces de mort et la violence à l’égard des hommes, ont également été documentés. 

Ahmed Souab

Désolé, cet article est seulement disponible en العربية.